“ Si rien n'est fait pour inverser la tendance, les gouvernements devront assumer la responsabilité d'un niveau de dégradation et de répercussions sans précédent ”
Par Rémi Barroux - Le Monde.fr | 06.06.2012
A deux semaines de l'ouverture, au Brésil, du sommet mondialRio+20 consacré au développement durable, le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) veut mettre sous pression les responsables politiques. "Si
rien n'est fait pour inverser la tendance, les gouvernements devront assumer la responsabilité d'un niveau de dégradation
et de répercussions sans précédent", a déclaré Achim Steiner, directeur
général du PNUE en présentant, mercredi 6 juin, le rapport sur "l'avenir de l'environnement durable", Geo-5.
Ce scénario dramatique est connu et repris dans de nombreux rapports
des Nations unies, du WWF, de l'OCDE, etc. : avec le développement
démographique de la Terre qui doit s'apprêter à accueillir, et nourrir, 9 milliards d'humains, et la raréfaction des ressources naturelles,
l'état de la planète se
dégrade à grande vitesse, explique le PNUE.
Sur 90 objectifs définis comme prioritaires, tels que la protection de
la biodiversité, le contrôle et la réduction de la pollution de l'eau douce, la
réduction de la production et de l'usage des métaux lourds, la majorité n'a pas
connu de réelle amélioration. Sur le changement climatique notamment, indique
le rapport, sur la protection des réserves halieutiques ou encore la lutte contre
la désertification, soit au total 24 objectifs, il n'y a eu aucun progrès ou
seulement à la marge. Pire, la situation s'est détériorée pour 8 de ces
objectifs, notamment la protection des récifs coralliens dans le monde.
Si l'on tient compte de l'impossibilité pour le PNUE d'évaluer 14 des
objectifs prédéfinis - l'organisation basée à Nairobi déplore fortement le
manque de données disponibles dans de nombreux secteurs et propose que ces
informations soient systématiquement intégrées aux statistiques nationales -,"certains
progrès ont été accomplis à l'égard d'une quarantaine d'objectifs portant
notamment sur l'extension des zones protégées comme les parcs nationaux et les
efforts en vue de la réduction de la déforestation", dit le PNUE.
LES BONS EXEMPLES
Mais ce tableau à destination des participants à Rio+20 n'est pas qu'un
cri d'alarme et un aveu d'impuissance. Au contraire, expliquent les
responsables du PNUE, les exemples de politiques volontaristes sont nombreux,
au niveau d'Etats, de régions, voire de villes : politique de l'eau gratuite en Afrique du Sud, taxe-carbone
instaurée dans l'Etat de Colombie
britannique au Canada,
détection et réduction des fuites dans le système de distribution d'eau au
Bahreïn, péage urbain à Stockholm ou encore programmes aux Maldives, menacées
par la montée des eaux, pour atteindre l'objectif de zéro émission de carbone en
2019.
Le patchwork de ces initiatives est impressionnant. Mais ne saurait masquer l'inertie qui règne au niveau mondial. "Il
y a une dichotomie entre la morosité ambiante et le fait qu'un certain nombre
de pays avancent sans attendre, chacun dans leur coin", explique Sylvie
Lemmet, directrice de la division technologie, industrie et économie du PNUE.
Cette dichotomie s'illustre aussi au niveau des Etats. La Chine, premier producteur de panneaux
photovoltaïques au monde, championne des investissements dans l'économie
verte... et aussi premier pays émetteur de CO2, est très dynamique pour transformer son économie mais refuse les contraintes
au niveau mondial.
"Les pays entendent rester souverains quant à leur mode et leurs capacités
de croissance", avance Mme Lemmet. Autrement dit par Steven
Stone, responsable de la branche économie et commerce du PNUE, en charge de
l'économie verte, "certains gouvernements ont des programmes
remarquables pour développer les emplois verts mais cela ne débouche pas au
niveau mondial, parce que dans le cadre de la concurrence exacerbée par la
mondialisation, les problèmes de leadership se posent".
Ce qui réduit d'autant les chances de progression et d'accord au sommet
mondial au Brésil. Le
PNUE veut croire que Rio+20 sera l'occasion "d'évaluer
les réalisations et les échecs, ainsi que d'encourager la mise en œuvre de mesures mondiales vers
le changement". "Le moment est venu de dépasser la paralysie de
l'indécision, de reconnaître les faits et de regarder en face l'humanité collective qui unit tous
les peuples", insiste Achim
Steiner.
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