mardi 29 mai 2012

Rencontre avec Amory Lovins, président du Rocky Mountain Institute

Promoteur du «capitalisme naturel», ce physicien, que le magazine Time a classé en 2009 parmi les 100 personnes les plus influentes du monde, a dessiné une vision optimiste du futur lors d'une conférence à Paris en 2009.


Par Agnès Sinaï  |    |  Actu-Environnement.com


Amory Lovins
Basé à Snowmass, dans les montagnes rocheuses du Colorado aux Etats-Unis, Amory Lovins a co-fondé le Rocky Mountain Institute au début des années 80, un«think-and-do-tank » à l'origine du concept des Negawatts prônant une « acupuncture institutionnelle ».

Préférez-vous mourir à cause du changement climatique, d'une guerre pour le pétrole ou d'un holocauste nucléaire ? La bonne réponse est… pour aucune de ces trois raisons. Amory Lovins lance sa conférence par cette boutade, qui caricature les périls de notre époque pour mieux les conjurer. Et raconte que l'avenir est aux systèmes intelligents, à l'image de sa maison dans le Colorado où il a récolté 28 récoltes de bananes dans sa serre, par une température extérieure de moins 20 degrés sans recourir à des énergies fossiles. Une équation ludique, à son image d'ingénieur à la Géo Trouvetout. D'autant que la solution à ces maux est d'une simplicité cardinale, la thérapie de bon sens :une « acupuncture institutionnelle » pour cibler les gisements d'économies d'énergie.


Quand les décideurs de ce monde auront abandonné la croyance selon laquelle lutter contre le changement climatique coûte cher, ils comprendront qu'il est moins onéreux d'économiser l'énergie que de l'acheter. La transition énergétique non seulement ne va rien nous coûter, mais va nous rapporter, Amory Lovins sait le démontrer grâce à la cinquantaine de slides présentées lors de sa conférence. Du reste, bien des entreprises l'ont déjà compris, comme IBM, Dupont, Dow Chemicals, United Technologies et General Electrics, qui s'illustrent par des réductions d'un tiers de leurs consommations d'énergie, voire, pour l'entreprise Interface, de 82% de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.

L'avenir est à l'efficacité énergétique


Selon une étude de Mac Kinsey publiée en janvier 2009, 70% des émissions de gaz à effet de serre pourraient être évitées en 2030 pour un coût de 4€ la tonne de CO2 équivalent, par le recours à une combinaison de stratégies d'efficacité énergétique et d'éco-technologies : généralisation d'ampoules à basse consommation, isolation des bâtiments, moteurs efficaces, chauffage au bois, micro-hydraulique, restauration des sols, climatisations douces… Exemple spectaculaire de ce type d'initiatives : la réhabilitation en 2009 des 280.000 m2 de l'Empire State Building à New York va permettre d'économiser 38% d'énergie finale, avec un amortissement sous trois ans, le remplacement des 6.500 fenêtres de l'édifice va éviter les deux tiers de la dissipation de chaleur en hiver et doubler l'efficacité thermique en été.
A l'échelle des Etats-Unis, la diffusion de l'efficacité énergétique permettrait d'économiser la moitié du pétrole et du gaz consommés et les trois quarts de l'électricité. Le tout à un coût d'au moins un tiers inférieur au montant actuel de la facture énergétique américaine. Ce serait, selon Amory Lovins, une manière de gagner au jeu de la fin du pétrole et de court-circuiter le pic des énergies fossiles en sortant rapidement de leur addiction. Il faut commencer par les véhicules, qui, aux Etats-Unis, consomment 70% du pétrole. Ils pourraient consommer deux tiers de moins de carburant s'ils étaient plus légers, grâce à des matériaux tels que les fibres de carbone, comme le Concept Car de Toyota, un hybride ultra léger. Car Lovins démontre, en bon physicien, que seuls 6% du carburant servent à faire tourner le moteur, et que 87% du carburant n'atteignent jamais les roues, en raison du surpoids des véhicules…

Le nucléaire, aberration économique


Cas d'école de l'inefficacité énergétique, le nucléaire est présenté par Lovins comme une aberration thermodynamique et économique. Son effondrement sur les marchés (« nuclear power's market collapse ») est, selon Lovins, une bonne nouvelle pour le climat et la sécurité internationale : la chute du nucléaire permet d'investir 2 à 20 fois plus dans les secteurs de petites unités de production et de distribution d'énergie (co-génération, biomasse, petite hydraulique, réseaux électriques intelligents) et libère 104leviers macro économiques pour financer d'autres secteurs - éducation, santé publique, développement. Le choix nucléaire français, selon Lovins, n'est pas un franc succès : il a servi à diffuser le coûteux chauffage électrique chez un quart des ménages français ; la France importe un tiers de son énergie, 8 Twh par an d'Allemagne, pour couvrir ses pics de consommation ; elle n'a réduit sa facture pétrolière que d'un dixième depuis 1973, et consomme 12% de plus de pétrole per capita que l'Italie, qui est pourtant sortie du nucléaire… Le nucléaire ne produit que 18% de son énergie finale, son indépendance énergétique n'est que de 6%, et elle importe tout son Uranium. Sa facture énergétique a atteint un record en 2008 : 80 milliards de dollars. Et, pour couronner le tout, la France émet plus de CO2 qu'au milieu les années 80… Un bilan somme toute peu convaincant, selon le président du Rocky Mountain Institute.

Des compagnies au service des économies d'énergie


La solution, c'est de transformer les entreprises de production d'énergie en compagnies de services énergétiques efficaces, au service de l'intérêt des consommateurs. C'est le cas de Pacific Gas and Electricity, en Californie, qui s'est vu prescrire un objectif plafonné de production d'électricité, à charge pour elle d'aider ses abonnés à ne pas dépasser la facture. C'est ainsi que la Californie a évité 65 gigawatts de pics de consommation. Selon lui, si tous les Etats américains imitaient cet exemple, 62% de l'électricité actuellement produite à partir du charbon seraient désormais inutiles et 57% des émissions américaines évitées. Chiche ?

2 commentaires:

  1. On le sait la facture energetique en france est à l'origine de plus de 90% du déficit commercial, et la facture petroliere se chiffre a 55 M d'euros d'importations par an, source :
    http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/08_-_Les_importations_exportations_facture_nergtique.pdf
    Inversement la Tipp rapport à l'Etat 34 Milliards d'Euros par an.
    Or je lis sur yahoo, qu'on pourrait produire soi meme son petrole à partir de l'eau de Mer (c'est pas le premier Avril):
    https://fr.news.yahoo.com/l%C3%A8re-p%C3%A9trole-%C3%A0-volont%C3%A9-062901132.html
    à un cout max de 6$ le gallon. Comme chacun sait que le gallon fait 3,78 litre,
    ca met le litre de petrole d'eau de mer à 1$58 le litre, soit environ 1,24Eur le litre. Il suffit donc que l'etat renonce à la tipp pour que le litre de petrole d'eau de mer soit rentable a la pompe.A partir de ce moment la on réduit le déficit
    commercial de 55 Milliards, c'est à dire presque à l'equilibre, et on engrenge des recettes fiscales à partir des societes produisant le pétrole d'eau de mer en France. Il y a plus qu'à..

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  2. Petit errata de ma précédente contribution. On ne dit plus tipp mais ticpe et elle ne rapporte que 25 Milliards par an.
    Avec 1eur 34 et 1eur 54 les prix de vente des littre d'essence et de petrole
    le petrole d'eau de mer ne serait compétitif par rapport au gazole
    qu'en ne le taxant à 10% max, et pas par rapport au fioul. sources:
    http://www.prixfioul.fr/
    http://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/structuration-des-prix-de-l-essence-et-du-gazole-france
    http://www.manicore.com/documentation/petrole/usage_petrole.html
    Mais à 60% le petrole est utilise pour les transports..
    Donc en résumé calculs à la louche on abandonne la ticpe sur le petrole eau de mer a destination des transports, perte pour l'etat 15 milliards, mais inversement 33 milliards de petrole eau de mer sont produits en France, ce qui augmente le pib de 1,5%, et l'etat recolte en contre partie (56% de prélévements obligatoires), les 15 milliards qu'il a perdu en suppression de la ticpe. Bon évidemment ces derniers prélévemments augmentent sensiblement le cout du petrole eau de me fabriqué en France, mais ca peut devenir rentable
    pour l'etat et le consommateur, des que le prix du baril aura augmenté de .. disons 10%, et que les économies d'échelle sur le petrole eau de mer le rendront disons ..20% moins cher que 1EUR24 le litre..

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