dimanche 4 décembre 2011

Division du travail et répartition des revenus


Le revenu, une nécessité dans une société 
de division du travail 

Alors que la zone Euro aura 800 milliards d’euros à trouver en 2012 pour se refinancer, la perte de 30000 emplois en France semble secondaire au vu des analyses. L’impression générale est que l’emploi se dégrade à cause des plans de rigueur mis en place.

Evidemment, les plans de rigueur diminuent la surface de consommation. Les prévisions des producteurs sont donc pessimistes et ceux-ci réduisent leurs capacités de production pour ne pas produire à perte. Cette réduction implique une diminution du nombre d’heures travaillées. Dès lors des choix s’opèrent parmi les travailleurs qui sont mis en concurrence avec un accroissement de la compétition sur les coûts. En effet, les entreprises cherchent à diminuer leurs coûts en raison de perspectives difficiles, et en plus, pour un même nombre de travailleurs compétents dans un secteur, il y a moins de besoins et il peut donc faire un choix vers ceux qui acceptent une rémunération moindre.

Le seul problème du producteur est de produire quelque chose qu’il pourra vendre afin d’acquérir de la monnaie.

Pas besoin de question de compétitivité pour que cette diminution impact à la fois le nombre de travailleurs et la rémunération de ceux qui gardent un emploi : ceci marcherait de la même manière dans une économie fermée. Simplement, les disponibilités externes accessibles (là où l’entreprise a un établissement) seront prioritaires si elles sont moins chers pour un même niveau de compétences et d’infrastructures.

Dans cette logique dépressive, il faut noter que le problème du producteur n’est pas de produire en fonction des capacités en matières premières, des compétences et du temps disponibles, ou encore des besoins de la population. Le seul problème du producteur est de produire quelque chose qu’il pourra vendre afin d’acquérir de la monnaie.

On en vient alors au problème principal : pourquoi veut-il produire pour de la monnaie plutôt que pour augmenter les biens et services à disposition et donc le bien être général ? Si l’on suit la logique classique, la réponse est qu’il ne produit pas pour le bien-être général mais juste pour sa pomme. Mais dans ce cas, pourquoi ne produit-il pas juste ce dont il a besoin personnellement ? Pourquoi s’est-il spécialisé dans la production d’un bien qu’il va produire en centaines d’exemplaires alors qu’il n’en aurait besoin que d’un seul ? La raison en est simple : la division du travail !

En gros, les hôtels sont de plus en plus miteux mais quelques-uns, toujours moins nombreux en proportion de la population, peuvent s’offrir des palaces.

C’est la croyance dans le fait que produire cent voitures lui permettra d’acquérir un équivalent de biens et services supérieur à ce qu’il aurait eu s’il avait voulu produire chacun de ces biens lui-même.
Or ceci suppose qu’il puisse échanger ces 100 voitures contre tous ces biens. S’il produit 100 voitures mais que ses acheteurs n’ont pas assez de monnaie pour lui donner la capacité d’acheter les biens et services qu’il pensait acquérir en contre-partie, il va commencer à douter de l’intérêt de se spécialiser et préférera produire moins de voitures et avoir du temps pour produire lui-même les autres biens. Il s’agit donc d’une défiance dans le marché mais aussi et surtout d’une défiance dans sa capacité à acquérir de la monnaie en quantité suffisante.

La spéculation, l’accumulation monétaire, la cupidité, engendrent une sortie supplémentaire de la monnaie et un déséquilibre sur les marchés qui impliquent à la fois une volonté d’acquérir plus avec les 100 voitures produites (il veut faire un profit supplémentaire) tout en diminuant cette capacité (les autres auront moins, ce qui est la contre-partie de ce déséquilibre). Il va donc préférer produire 90 voitures plus chères qui s’échangeront entre ceux qui ont été « gagnants » dans la période précédente. Il aura moins de biens et services mais plus de monnaie et, d’autres n’ayant plus accès à ces marchés, il aura même plus de biens et services relativement au reste de la population. Comme chacun produit moins, ces produits peuvent avoir une conception améliorée, c’est ce qui correspond au luxe. En gros, les hôtels sont de plus en plus miteux mais quelques-uns, toujours moins nombreux en proportion de la population, peuvent s’offrir des palaces.

C’est donc bien la division du travail qui crée le marché et le marché qui crée la monnaie.

Nous voyons donc que la quantité de monnaie accessible au travailleur est essentielle pour le fonctionnement de l’économie mais aussi de la finance : le travailleur n’ayant plus accès à la monnaie va diminuer le travail consacré à l’obtention de cette monnaie et dévaloriser ainsi la valeur monétaire.
En effet, la valeur de la monnaie dépend avant tout de ce que cette monnaie permet d’acquérir. Si les producteurs ne produisent plus pour acquérir de la monnaie par manque de confiance, la monnaie perdra de sa valeur. C’est donc bien la division du travail qui crée le marché et le marché qui crée la monnaie. Dans ce cadre, il devient clair que chaque fois que le nombre de travailleurs diminue, nous augmentons le risque sur la confiance de ce système. L’exclusion du travail étant actuellement aussi l’exclusion à l’accès à la monnaie et donc aux marchés, les travailleurs, sont incités à se déspécialiser et à redevenir autonomes réduisant encore le marché.

Il est donc essentiel que l’accès au travail soit facilité à moins d’accepter la distribution de revenus sans travail pour certains pendant que les autres travaillent plus. Ce qui est certains, c’est qu’à une quantité globale de temps de travail donnée (et dans le temps cette quantité a toujours diminué même pendant les 30 glorieuses), il faut faire des choix de partage du travail et de répartition des ressources.

Les gains présents donnés au propriétaire de ce capital sont donc tout aussi contestables que ceux donnés aux « assistés ».

Ces choix ayant des conséquences sur l’utilité de la monnaie et sa valorisation, la question de la réduction du temps de travail a un lien direct avec la crise actuelle, mais pas celui qu’on croit.
Il est utile de voir que la répartition de ces ressources possède 2 grandes clés et une petite.
La petite clé est la redistribution, les minimas sociaux que certains qualifient maintenant d’assistanat et de cancer de la nation.
L’une des grandes clés est la possession d’un capital c’est-à-dire d’un capital passé cristallisé et réutilisable. Il faut noter que la valorisation de ce capital dépend aussi de facteurs de connaissance (recherche, éducation, …) et de besoins de société (un train à vapeur reste utile mais ne correspond plus aux besoins de vitesse de notre société) qui ne sont pas le fait des propriétaires de ce capital. De plus, cette propriété est de plus en plus souvent transmise et n’est plus liée à un travail passé effectué par le propriétaire. La monétisation de ce capital en permet la modernisation puisque ce n’est plus la machine qui est possédée mais ce que produit la machine, y compris le renouvellement de ce bien. Le capital est donc cumulable et transmissible. Les gains présents donnés au propriétaire de ce capital sont donc tout aussi contestables que ceux donnés aux « assistés ». Dans les 2 cas, le percepteur de ressource n’a rien produit lui-même dans la période présente.

faire le choix d’une répartition déséquilibrée du travail va impliquer une diminution de l’efficacité de ce travail.

La troisième clé est bien sûr le travail. Si l’on exclut la petite clé, il devient alors nécessaire d’être propriétaire de capital ou bien d’avoir accès à la monnaie par le travail. Si l’on est exclu de ces 2 clés, la survie implique que l’on doive sortir du système de division du travail et se fournir soi-même de tout ce dont on a besoin. Or, plus cette population d’exclus grandit et plus la probabilité d’en faire partie grandit aussi. Le travailleur avisé percevant ce risque va limiter son travail spécialisé, c’est-à-dire son investissement dans ce système (formation, temps consacré, …). Si l’on considère que la spécialisation est un facteur d’efficacité, la déspécialisation devrait limiter cette efficacité.
De ce fait, faire le choix d’une répartition déséquilibrée du travail va impliquer une diminution de l’efficacité de ce travail. Par conséquent, le partage du travail est plus efficace que le rationnement de l’accès à au travail. De plus, l’incitation au travail et à la spécialisation dépendant de l’accès au marché et donc aux productions des autres spécialistes, ce travail doit être suffisamment rémunéré pour donner accès aux marchés des biens et services. La répartition de la monnaie entre travailleurs d’une part, et avec les propriétaires du capital d’autre part, est donc essentielle pour… la valeur de la monnaie !

La logique actuelle des gouvernements et de nombreux « experts » médiatiques est de sauver le système monétaire en sauvant les financiers, c’est-à-dire les (assistés) propriétaires du capital.
Pourtant, c’est le travail et la capacité d’accès aux marchés qui donnent de la valeur à la monnaie. Toute politique voulant sauver l’euro devrait donc avoir pour objectif de répartir le travail et les ressources à un plus grand nombre. La mauvaise répartition du travail est une des causes de la détérioration du système financier. La suppression d’emploi est donc à la fois une cause et une conséquence de la dégradation du système financier. Mais pire pour le système financier : celui-ci n’a d’utilité et de valeur que dans le cadre de la confiance dans un système de division du travail. Si cette confiance est perdue, les consommateurs n’ayant plus les moyens de consommer deviendront à nouveau producteurs de leurs propres besoins, supprimant la possibilité d’échanges et donc l’utilité de la monnaie. La mode des monnaies complémentaires permettant la création de nouvelles zones de production autarciques au sein de la zone générale en est une alerte. La réduction du temps de travail et l’augmentation des salaires horaires en est une solution indispensable !

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